FAQ générale

Infirmiers de Rue asbl est une organisation médico-sociale convaincue de la possibilité de mettre définitivement fin au sans-abrisme à Bruxelles, à Liège et ailleurs. Notre organisation contribue à cette mission en sortant de la rue les personnes sans-abri les plus vulnérables en termes de santé et en mobilisant les autres organisations ainsi que le grand public pour trouver des solutions durables à la problématique des personnes sans-abri.

Pour arriver à reloger durablement ses patients, des personnes sans-abri en grande précarité, Infirmiers de rue s’appuie sur les leviers suivants :

  • faire prendre conscience de l’importance de leur santé et de leur hygiène et les motiver à se prendre en charge;
  • améliorer petit à petit l’estime de soi, entre autres en valorisant les qualités et les talents.
  • collaborer intensivement avec d’autres organisations et institutions car il est plus sain pour le patient d’être confronté à plusieurs interlocuteurs afin de se sentir soutenu. De plus, un travail efficace et à long terme ne peut se réaliser seul;
  • la création de logements

 

Infirmiers de Rue s’applique à susciter l’enthousiasme, à rassembler le public et à travailler de façon innovante dans le but de mettre fin au sans-abrisme.

Infirmiers de rue donne des formations aux professionnels : né d’un besoin constaté dans le secteur, ce partage d’expérience et d’expertise est un moyen d’étendre notre impact sur la société.

Infirmiers de Rue partage également son expertise et expérience avec les professionnels en accueillant des organisations belges et européennes et en participant à des programmes d’échanges en Europe et ailleurs.

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Confiance envers les autres

Tout d’abord nous essayons de gagner leur confiance en créant un lien. Lorsque la personne sans-abri commence à avoir confiance en nous, nous l’aidons à comprendre l’importance d’une bonne hygiène. Nous y consacrons le temps nécessaire, nous respectons son rythme mais nous ne l’abandonnons jamais, et ce jusqu’à ce que la personne sans-abri nous permette d’entrer dans son univers. Cela peut prendre des mois.

Hygiène et santé

Se laisser entraîner pour une douche, consulter un médecin ou juste accepter de se laver les mains,... Chaque petit pas est important car petit à petit le patient réapprend à se respecter et reprend confiance en lui, ce qui est indispensable pour oser s’imaginer en logement à nouveau... A nous de les aider à réaliser tout cela !

Estime de soi, confiance en soi

Dès le début nous veillons à les rendre conscients de leurs talents/ressources, de leurs qualités et de ce qui leur fait plaisir (musique, promenade en nature, cuisine, etc.), toujours dans l’intention de réactiver l’envie de vivre et l’estime de soi.

L’administration

Absence de carte d’identité et d’adresse, perte des droits sociaux, … : remettre en ordre son existence administrative demande du temps et une énergie qu’ils n’ont plus : nous leur apportons un soutien administratif et juridique.

Logement

Une fois relogé (ce qui peut aller très vite mais peut aussi prendre plusieurs années – durée moyenne : 1 an et demi) nous continuerons à les suivre de près jusqu’à ce qu’ils deviennent autonomes, et encore après. De plus, un bénévole visiteur attitré passera chez eux régulièrement, pour une simple visite, ou encore pour boire un café, jouer aux échecs, faire une sortie en nature.

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Nous nous occupons uniquement des personnes sans-abri les plus vulnérables.

Plusieurs critères entrent en jeu, tels que : l’immobilité (le fait de rester quasiment tout le temps au même endroit en rue), l’âge, le « laisser-aller », la santé mentale et physique, possède-t-elle un réseau ou pas, le nombre d’années en rue (avant à partir de 8 ans de rue, maintenant à partir de 3 ans de rue – car les cas les plus lourd sont à présent sortis de la rue), le sexe, etc.

Nous n’ignorons pas les personnes sans-abri que nous n’avons pas pu inclure dans notre suivi : au contraire, nous encodons les informations qui les concernent, allons à la recherche d’éventuels suivis par d’autres organisations et revenons vers eux dès qu’une place se libère. Nous travaillons toujours en réseau avec les institutions et acteurs sociaux et médicaux bruxellois.

Ces termes désignent le type d’accompagnement réalisé avec le patient :

Pré-suivi

C’est la phase d’enregistrement de toutes les personnes signalées par le réseau et les particuliers. Une personne sans-abri arrive dans le “suivi” des équipes de rue lorsqu’elle est considérée comme particulièrement vulnérable, et ce, sur base de différents critères objectifs.

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Suivi en rue

Le suivi est un accompagnement intensif de la personne, c’est le cœur de notre travail. Il commence en rue et se poursuit jusqu’à la réinsertion du patient en logement où il bénéficiera encore du soutien des professionnels et des bénévoles d’Infirmiers de rue, de manière régulière mais espacée. Ceci évite la rechute du patient et son retour en rue.

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Suivi en logement

Nos activités dépassent le simple accompagnement de ces gens de la rue vers un logement fixe. Une fois les patients relogés, nous continuons à les suivre de près durant une longue période.

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Post suivi en logement

Pendant ces 10 premières années d’existence de l’association, nous avons sorti de la rue des personnes qui avaient minimum 8 ans de rue (entre 8 et 25 ans). Il s'agissait donc de personnes extrêmement vulnérables et avec des problématiques très complexes. Les travailleurs du secteur médico-social n’espéraient plus que ces personnes sortent un jour de la rue.

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Les étapes par lesquelles passent le patient sont très longues :

  1. Faire confiance à l’équipe
  2. Se refaire une santé
    1. Se soigner, s’inscrire dans une maison médicale, suivre la médication, poursuivre les soins, etc.
  3. Reprendre confiance en soi, retrouver l’estime de soi
  4. Remettre en ordre sa situation administrative.
    1. La remise en ordre de la situation administrative du patient (carte d’identité, droits sociaux) peut, selon les cas particuliers, prendre beaucoup du temps et nécessite dans certain cas des recours à des avocats.
  5. Entrée en logement.
    1. Cette dernière étape ne dépend pas du patient. Une fois que le patient à la volonté de s’en sortir et des documents en ordre, il faut encore qu’il y ait un logement de disponible. Le nombre de personnes sans-abri que nous pouvons faire sortir de la rue est lié étroitement au nombre de logements disponibles. En raison du manque de logements à Bruxelles -qui est d’ailleurs considérable- il y en a eu 16 en 2019. Infirmiers de rue mets d’ailleurs en place des projets pilotes et innovants pour trouver de nouveaux types de logements pour les personnes les plus vulnérables.
  6. Vivre en logement.
    1. Nos activités dépassent le simple accompagnement de ces gens de la rue vers un logement fixe. Une fois les patients relogés, nous continuons à les suivre de près durant une longue période. En plus nous menons des campagnes et travaillons à la prise de conscience de la problématique du sans-abrisme.

Nous aspirons à une société où il n’y aurait plus de personnes sans-abri. Le sans-abrisme ne devrait être qu’une situation exceptionnelle, suite à une urgence, et non pas structurelle.Nous sommes vraiment persuadés que le sans-abrisme n’est pas une fatalité, ni pour la personne concernée, ni pour la société. Personne ne dort en rue par sa propre volonté. La durée de vie moyenne y est de 47 ans contre une espérance de vie de plus de 80 ans pour la population belge en général.  Nous sommes persuadés que pour chaque personne marginalisée qui vit dans la rue, il existe la possibilité et le droit d’être accompagné et surtout un logement adapté permettant de sortir réellement de la rue. Nous croyons que chaque individu possède les valeurs et talents nécessaires pour trouver sa place dans la société.

Nous avons l’ambition de faire disparaître le sans-abrisme structurel à Bruxelles fin 2025, en rassemblant le monde politique, les citoyens, des entreprises et d’autres investisseurs. Nous aspirons à un monde où chacun vit dans des conditions dignes et en sécurité. Nous voulons prouver que cela est possible à Bruxelles et faire de Bruxelles un exemple pour la Belgique mais aussi pour les autres pays.

Le travail en réseau est indispensable pour être efficace. De plus, pour le patient, ce travail en réseau est essentiel : car c’est en s’insérant lui-même dans un réseau d’associations et de personnes ressources qu’il va se sentir soutenu, moins isolé et capable de demander du soutien de lui-même.

Une centaine d’associations et institutions constituent notre réseau. Chaque organisation concernée par la précarité propose une approche spécifique et un travail qui lui est propre. Les patients sont souvent suivis en même temps par une série d’organisations. Pour cette raison, nous avons sans cesse besoin d’échanges et de concertations entre les différentes organisations et sociétés d’assistance.

Chaque organisation a un objectif différent et traite des problèmes différents. Quelques exemples:

  • L’Ilot accompagne des personnes sans-abri vers les maisons d’accueil
  • Le SAMU social travaille également la nuit et possède des lieux d’accueil d’urgence
  • Si un logement est disponible, différentes organisations se concerteront pour savoir quel patient aura la priorité
  • Certaines travaillent plus spécifiquement avec des familles ou des jeunes.

Nous sommes en relation avec des mouvements pour la fin du sans-abrisme en Europe, et ailleurs comme aux Etats-Unis ou au Japon, afin de partager notre expertise et nous nourrir des solutions mises en place en dehors de Bruxelles. Ces échanges sont importants pour l’innovation, la remise en question et pour se donner du courage dans la lutte quotidienne contre la précarité.

Pour le problème du sans-abrisme à Bruxelles personne n’a une vision qui est claire et solide ou qui donnerait les faits et chiffres nécessaires. Différents facteurs et causes jouent un rôle. Les causes qui amènent en rue sont multiples : une maladie, la malchance d’une relation, la perte d’un emploi ou une faillite. Mais la raison commune à tous est l’absence de réseau de solidarité. Ils se retrouvent donc tous seuls.

Mais la situation économique des citoyens, les lacunes du filet de la sécurité sociale, des manquements dans le suivi de la situation médicale de patients (physique et santé mentale), les migrations : ce sont autant de facteurs qui jouent un rôle dans la progression du sans-abrisme.

Parmi ceux qui passent la nuit dans la rue, nous voyons des personnes âgées et jeunes, hommes et femmes. Le recensement de 2017 de la Campagne 400 Toits (à laquelle nous participons très activement) donne 12 % de femme présente en rue lors du recensement. La rue est encore plus dangereuse pour les femmes. Souvent, la priorité pour un logement d’urgence leur est accordée, en raison de leur plus grande vulnérabilité. Mais femmes comme hommes sont à égalité pour dire que leur itinérance a été causée par un traumatisme (36 %).

En 2017, plus d’un quart des participants au recensement avait moins de 35 ans, 7% avait plus de 60 ans. La catégorie la plus représentée est celle des 46-59 ans avec 34%.

C’est votre choix finalement : l’argent, de quoi manger ou boire ou encore quelque chose de matériel. Il est important que vous vous sentiez bien avec votre choix.

Quand vous voulez offrir à une personne une chose à manger, il vaut peut-être mieux lui demander d’abord ce qu’elle voudrait manger ou boire. De cette façon vous allez éviter les situations difficiles. Je vous donne deux exemples: une pomme pourra être rejetée, parce que la personne en question n’a plus de (bonnes) dents pour pouvoir la manger; donner à un musulman une tartine au jambon. On a toujours le droit d’indiquer qu’on n’aime pas donner certaines choses, comme l’alcool.

Donner de l’argent à quelqu’un, c’est aussi lui donner la liberté et la responsabilité de faire son propre choix sur l’attitude à prendre.

Nous nous occupons de personnes avec des problèmes de santé mentale, néanmoins nous essayons de limiter ce taux de patients car ce sont des personnes dont la prise en charge est lourde et longue. Pour le bien-être et la motivation de l'équipe de terrain, il est crucial de faire attention à ce facteur-là.

Les personnes sans papiers sont souvent les personnes avec des problèmes de santé mentale, nous nous limitons donc quant au nombre de patients sans papiers. Le parcours pour obtenir des papiers en ordre est long et fatiguant et nous voulons garder une équipe motivée et dynamique. Nous avons du personnel compétent qui s'en charge mais ce n'est pas le public-cible particulier de l'association. Le public-cible, ce sont les personnes les plus vulnérables. Il se fait que parmi les personnes les plus vulnérables on trouve de plus en plus de personnes sans-papiers.

Nous avons mis en place des formations à destination du personnel médico-social qui était découragé ou qui avait peur de parler d’hygiène avec les personnes sans-abri.

Nos formations « hygiène et précarité » s'adressent à tout professionnel qui rencontre un usager qui se néglige et qui aimerait être plus à l'aise pour lui en parler. Ces formations interactives permettent de trouver des clés pour aborder l'hygiène sans tabou. Elles sont destinées au personnel médico-social, les agents de la prévention et de la sécurité, etc.

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A l'heure actuelle (2023), l'organisation compte plus de 50 employé·es, dont, bien sûr, un médecin et des infirmières. Il y a aussi des travailleurs sociaux, une psychologue, des éducateurs, des experts en logement et en logistique, des personnes chargées du lobbying, de la communication et de la collecte de fonds. Et, bien sûr, nous avons un certain nombre de membres du personnel qui veillent à ce que la gestion financière et l'administration se déroulent de manière fluide et professionnelle.

Nous sommes toujours ouvert à des propositions de bénévolat.

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FAQ travail de rue

Nous décidons, grâce à nos outils si une personne "correspond" à notre public cible. Si vous souhaitez signaler une personne vulnérable, vous pouvez nous contacter. Selon l’urgence de la situation, nous vous dirigerons vers d'autres associations et/ou une équipe ira voir sur les lieux et évaluera d'elle-même.  Par contre nous ne pouvons pas vous donner la garantie que nous irons dans un délai court, vu notre charge de travail.

Nous avons la capacité de suivre simultanément, de manière intensive, une trentaine de personnes en rue.
Sur une base annuelle, cela concerne une cinquantaine de personnes différentes que nous intégrons dans notre "suivi".
En outre, nous suivons en logement une soixantaine de patients.
En ce qui concerne le "pré-suivi", nous sommes également en contact avec environ cent cinquante personnes qui constituent, pour ainsi dire, la "salle d'attente" de notre suivi intensif.

La période moyenne nécessaire pour sortir quelqu’un de la rue, du premier contact au relogement réel dure environ 1 an et demi. Mais avec certains patients nous travaillons pendant de nombreuses années, tandis qu’avec d’autres nous réussissons à les reloger après seulement quelques mois.

Cela varie selon la personne et selon ses besoins du moment. De nombreux patients sont rencontrés chaque semaine et cela peut prendre des mois pour réussir à donner une première douche.

Dans un premier temps, il faut en général remettre en ordre leurs documents d’identité.

Ensuite nous voyons s’il y a des possibilités de revenus provenant du CPAS ou encore de la Mutuelle, du fonds de pension, du service du chômage ou autre. Cela représente une série de rendez-vous et de démarches.

Enfin, une fois en logement, nous devons prendre soin de la garantie locative: ce sera soit la personne elle-même qui avancera cette somme, soit ce sera le CPAS.

Lors de la première vague, de nombreuses personnes sans-abri n'ont pas compris pourquoi, tout à coup, il n'y avait plus personne dans les rues. Elles ont dû s'adapter. Beaucoup en ont souffert car ils n'avaient plus personne à qui demander une pièce, les snacks vers lesquels ils se dirigeaient pour demander des boissons et/ou nourriture gratuitement étaient fermés. Beaucoup se sont donc retrouvés assoiffés et affamés.

Nous avons donc dû, en attendant la (re)mise en place d'autres services qui ont dû réadapter leur fonctionnement, pallier les manques en distribuant de la nourriture et même de l'eau, ainsi que du matériel de protection et faire de la sensibilisation et de la prévention. Nous avons aussi participé à la prise en charge des personnes hébergées dans les hôtels en faisant des visites médicales deux fois par semaine.

FAQ travail en logement

Nous décidons en réunion quels patients iront dans quel logement. Notre décision est basée sur leur degré de vulnérabilité, mais aussi sur les caractéristiques des logements disponibles : le quartier où il se trouve, la logistique liée au logement (étage, ascenseur, ...).

Dès que nous pouvons mettre les personnes à l'abri, nous le faisons. Soit dans de l'hébergement d'urgence, soit dans des hébergements à moyen terme (maisons d'accueil). La recherche d'une solution plus durable se fait alors pendant le séjour en hébergement d'urgence. Il se fait que ces formes d'hébergement sont assez peu accessibles pour nos patients soit parce que les conditions d'accès sont trop contraignantes (horaires particuliers, abstinence, peu de délai de réflexion, ...) soit parce que les conditions de vie sont trop dures (violence, vols, parasites, ...) et que nos patients refusent encore d'y aller.

Oui, nous accompagnons encore le patient relogé. Lorsque le patient dormait en rue il vivait entouré d’énormément de gens. Bien que cette situation était très lourde à vivre psychologiquement, se retrouver subitement tout seul dans son logement peut être déstabilisant dans les premiers temps.

Une fois le patient stabilisé et autonome, nous continuons à aller le voir.

Le suivi se termine 10 ans après sa stabilisation en logement. Durant toute cette période, le suivi peut se réduire au maintien du contact, pour s'assurer que tout va bien, et pour garder l'information de l'état de santé du patient. L'idée est de garder une trace de l'impact des années de vie en rue sur la survie et la santé à long terme (10 ans) des personnes. L'autre utilité de ce suivi sur le long terme est de prévenir les retours en rue, en étant capable d'intervenir, si la situation se dégrade, avant une perte de logement. C'est aussi une garantie pour nos partenaires de réseau, à qui nous confions le suivi de nos patients: ils savent qu'ils peuvent nous appeler en cas de problème, même des années après.

A Bruxelles, le manque de logements est important. Notre organisation compte une équipe dédiée dite « créateur et capteur de logements » qui va à la recherche de logements pour nos patients. Nous trouvons des logements individuels (que nous mettons en gestion le plus souvent via des Agences Immobilières Sociales) ou collectifs (maison d’accueil, de retraite).

Nous cherchons également des solutions tout à fait innovantes : en 2018 nous avons installé un logement modulaire déplaçable sur un terrain en friche (donc moins onéreux car le terrain ne doit pas être acheté) et nous espérons intéresser les pouvoirs publics et les investisseurs afin d’en acheter d’autres et de disposer d’autres terrains en friche utilisables provisoirement, de 2 à plusieurs années.

Pour le moment, nos plus grands partenaires pour le relogement sont clairement les AIS (quasiment la totalité des relogements, et certainement tous les relogements directement depuis la rue), même si leurs loyers sont plus élevés qu'en logement social.

Nous avons plus facilement des places en AIS, il y a tout de même plus d'accompagnement et de tolérance pour nos patients, et lorsque la personne perd son logement, ce logement n'est pas perdu pour l’ASBL qui peut tout de suite reloger quelqu'un d'autre dans ce logement. Les logements sociaux sont moins chers mais ont des temps d'attente interminables (quelques années au minimum), ils sont beaucoup plus procéduriers et moins tolérants, et le logement est accordé à titre individuel: si la personne est expulsée, le logement est perdu pour le projet.

Toutes les associations qui font du relogement font de la captation/création ou se sont associées avec un service de captation/création plus collectif. Certains de ces services ont été créés récemment: Bru4home; cellule capteur logement de l'îlot.

Certains patients ont retrouvé un véritable emploi. D’autres font du travail bénévole afin de rester actif une fois en logement.

Mais nos patients forment un groupe cible très spécifique qui souvent est ou est devenu très vulnérable suite à un séjour prolongé dans la rue. Ou qui se voit confronté à des problèmes sévères, tant physiques que psychiques, de sorte qu’une réintroduction dans le circuit régulier du travail n’est pas toujours évident. Si possible, nous collaborons avec des organisations plus spécialisées pour pouvoir présenter un accompagnement de parcours ou une thérapie visant à la rééducation.

Les clichés sur les personnes sans-abri

Après avoir survécu plusieurs années dans la rue, nombreuses sont les personnes sans-abri qui s’imaginent que leur situation ne changera jamais. Souvent déçues et abandonnées par le système et certains services d’aide, elles peuvent se sentir humiliées et se replier sur elles-mêmes. Le refus de toute aide devient alors un mécanisme de défense, pour mieux se prémunir d’une nouvelle défaite qui serait insurmontable d’un point de vue psychologique. 

Différents facteurs altèrent leurs volonté et clarté d’esprit : la fatigue (4 heures de sommeil par nuit en moyenne), la mauvaise santé physique, la dépression, la mauvaise alimentation, sans parler même de l’alcool ou la drogue qui permettent d’oublier la difficulté quotidienne.

Afin d’éviter un nouvel échec, les personnes préfèrent donc se retirer d’elles-mêmes et des autres, on parle ici de « congélation du moi », c’est-à-dire que dans certaines situations d’exclusion, pour survivre, la personne est capable d’abandonner une partie d’elle-même. Ce syndrôme se distingue par plusieurs signes : anesthésie du corps, des émotions affaiblies, une pensée inhibée, un refus d’aide et un abandon des relations. 

Pour cette raison, il est important de gagner progressivement leur confiance, en allant à leur rencontre régulièrement, en avançant à leur rythme, sans leur forcer la main. Chaque petit pas (une douche, un soin, une visite chez le médecin) va les amener progressivement à avoir la conviction que sortir de la rue, c’est bien possible! Ce processus peut prendre de quelques semaines à environ deux ans.

Ainsi,grâce à un accompagnement adapté et soutenu, en gardant en ligne de mire notre objectif final de les sortir de la rue, des patient·es qui y avaient vécu 15 à 20 ans de rue ont fini par souhaiter un logement et ont réalisé leur envie.

Personne ne choisit cette option-là. Bien que chaque personne sans-abri ait sa propre histoire de vie, un parcours différent et unique, il est possible, selon un constat de terrain, d'identifier différentes causes qui peuvent conduire à l'arrivée en rue : maladie (physique ou mentale), perte d'emploi, lenteur d’une décision administrative, violences familiales, catastrophe climatique, addiction, perte d’un proche, absence de réseau (ami·es, famille), etc.

Vivre dans la rue est extrêmement difficile. Les personnes sans-abri subissent régulièrement des agressions, et leur santé physique et psychique s’abîme très rapidement. La durée de vie moyenne est de 47 ans pour les personnes sans-abri contre une espérance de vie de plus de 80 ans pour la population générale. 

Le manque d’intimité est également très problématique et de nombreuses personnes ressentent une grande honte du fait de leur situation. Personne ne souhaite vivre dans de telles conditions. 

Il est parfois possible d’entendre des personnes revendiquer une identité marginale. On peut parler ici de paradoxe identitaire: un besoin d’appropriation de la rue pour une reconnaissance plus satisfaisante face à l’exclusion, et ce pour une place sociale. Mais comme le dit si bien notre collègue « attention, si monsieur est sans-abri, il est avant tout une personne et à ce titre digne d’intérêt et de considération ».

Lors de nos différents accompagnements, nous veillons constamment à mettre en valeur les talents de nos patient·es, afin qu’ils et elles se souviennent qu’ils et elles possèdent de nombreuses ressources. Ainsi, nous leur rappelons que la situation de sans-abrisme demeure temporaire et n’est pas une identité. La volonté de retrouver un logement renaît au fil des rencontres et des démarches, et une fois que la personne a un chez soi, elle ne veut généralement plus le quitter.

Habiter de nouveau dans un logement quelconque, après toutes ces années dans la rue, signifie un changement radical. Cela fait peur: il faudra prendre de nouvelles habitudes et trouver de nouveaux repères. Un patient relogé commencera peut-être par dormir à même le sol au lieu d’aller se coucher dans son lit. Une période de transition et d’adaptation est tout à fait normale et nous accompagnons les personnes dans ce moment crucial de leur rétablissement. Mais finalement, ils finissent tous par apprécier et chérir le nouveau confort et surtout la sécurité qu'offre son logement.

Au début, en général, lorsqu’ils s’imaginent en logement, ils veulent absolument un logement individuel (enfin seul !), mais un certain nombre de personnes relogées finit par demander à déménager pour un logement collectif (colocation, maison de retraite, etc. ) car la solitude est trop difficile à gérer. Néanmoins, ce passage par un logement individuel aura été une étape indispensable, car ils n’auraient pas envisagé un logement collectif de prime abord.

L’alcool, la drogue, et d’autres dépendances sont très répandues auprès des personnes sans-abri, même si nous avons aussi parmi nos patients des gens qui ne consomment pas.

Si la personne consomme, il est souvent difficile d’en déterminer les causes, souvent multiples (lutte contre le froid, oubli des problèmes, influence du groupe, dépendance, ennui, etc.).

Une reprise en main de sa situation, la concrétisation de certains projets/objectifs comme une entrée en logement peuvent influencer positivement leur consommation, voire la diminuer ou l’arrêter.

La rue n’est certainement pas un endroit propice pour arrêter ces assuétudes. C’est pourquoi le programme Housing First (le logement d’abord) qui se développe dans de nombreux pays et auquel participe Infirmiers de rue, n’impose pas de sevrage avant l’entrée en logement.

Mendier représente pour les personnes sans-abri une stratégie de survie. En mendiant, elles vont disposer d’un peu d’argent avec lequel elles peuvent payer ce qui est important pour elles à ce moment-là. 

Cela pourrait être tout aussi bien l’occasion de prendre une douche que le fait d’aller manger dans un restaurant social. Cela peut varier d’un jour à l’autre. Et cela peut aussi servir à acheter de l'alcool, du tabac ou un autre produit, qui à ce moment-là joue un rôle important dans la vie de la personne, lui permet peut-être de tenir le coup ou de ne pas être trop angoissée.

Certain·es mendient aussi pour maintenir un contact social, parce que dans la rue, ils et elles vivent souvent dans la solitude. Pour d'autres, il s'agit d'un véritable travail, avec des horaires à respecter. La mendicité est souvent mal vécue, les personnes qui la pratiquent éprouvent un sentiment de honte, mais ne peuvent s’en passer.

Si vous êtes mal à l'aise à l'idée de donner de l'argent, vous pouvez tout à fait demander à la personne ce qui lui ferait plaisir et aller l'acheter vous-même, et il n’y a pas de problème de dire à la personne que vous souhaitez lui offrir autre chose que, par exemple, de l'alcool ou des cigarettes.

Les personnes sans-abri forment un groupe très hétérogène. Elles ont des personnalités et des caractères très différents les unes par rapport aux autres, comme dans la population générale.

Certaines sont timides, renfermées, polies, gentilles, drôles, discrètes, alors que d’autres affichent parfois un comportement plus extravagant, incohérent, qui peut sembler étrange, voire menaçant. Cela est dû, en grande partie, à leur situation, à leur état de santé physique ou mentale et leur vie en rue.

En effet, celle-ci est éprouvante et pleine de dangers. 50 % des personnes sans-abri indiquent avoir subi une agression et pas seulement par d’autres personnes sans-abri. Par exemple, les soirs de match ou de festivités sont plus risqués, nous rapportent des patient·es.

Aussi, la durée de sommeil moyen est de 4h/nuit, par intervalles de 10 minutes. Le risque de se faire voler les oblige à rester sur leurs gardes en permanence. Enfin, l’alcool et les problèmes de santé mentale peuvent accentuer le sentiment de méfiance (voir de paranoïa) envers les passant·es et les travailleurs·euses de terrain.

Pour toutes ces raisons, certaines personnes sans-abri peuvent se montrer agressives, même si elles restent, dans la grande majorité des situations, totalement inoffensives.

Il nous arrive parfois, lors de certaines rencontres, de nous trouver face à des refus ou de la colère, car nous ne sommes pas venu·es au bon moment. Nous permettons à la personne d’exprimer cela et lui proposons de revenir plus tard. 

Notre travail nous permet de prendre du temps avec la personne et de sortir du cadre. Nous pouvons ainsi nous adapter à elle, respecter son rythme et être à l’écoute de ses besoins.

Vivre en rue est mortel, peu importe la saison. 

Dans un contexte où un hébergement d'urgence hivernal est organisé, l’hiver n’est plus nécessairement la saison la plus dangereuse. En effet, au printemps, la plupart des centres d'hébergement d'urgence ferment leurs portes, et des centaines de personnes se retrouvent dehors, avec toutes les conséquences que cela peut entraîner (perte de repères, isolement, etc.).

De plus, la plupart des personnes sans-abri souffrent de problèmes chroniques de santé physique ou mentale tout au long de l'année, ce qui les rend très vulnérables peu importe la saison.

En été, en cas de canicule, les personnes sont susceptibles de se déshydrater, ou de présenter des problèmes cardiaques : des risques importants s'ils ne sont pas pris en charge à temps.

Comme pour les autres saisons, nous nous préparons et restons attentifs aux spécificités.

En hiver, c'est le froid et sa conséquence majeure, l'hypothermie, qui constituent le danger principal. Les engelures, avec éventuellement risque d'amputation, présentent un autre risque, plus rare.

Pour prévenir ces incidents, nous avons créé deux outils de prévention : l’affiche « froid » et la fiche « hypothermie » (téléchargeables sur notre site).

S’il y a trois conseils à donner à la population dans ces situations, ce sont les suivants :

  1. Ne pas distribuer du thé ou du café aux personnes sans-abri, car ces boissons – de même que l’alcool – augmentent la déperdition de chaleur et sont diurétiques. Il vaut mieux choisir une autre boisson chaude : une soupe ou un chocolat par exemple.
  2. Si les symptômes d’une hypothermie légère sont facilement reconnaissables (grelottements, confusion, coordination difficile de la marche), les symptômes de l’hypothermie sévère sont, en revanche, méconnus : incohérence des actions, refus de soins, comportements anormaux, absence de tremblements, raideur musculaire, inconscience, …
  3. Si l’on pense être face à un cas d’hypothermie sévère, le bon réflexe est d’appeler une ambulance (100). Le réchauffement de la personne doit se faire graduellement, petit à petit, dans un milieu médicalisé. Un réchauffement trop rapide peut être dangereux.

Chez Infirmiers de rue, nous veillons à reconnecter nos patient·es sans-abri à une maison médicale ou à un médecin traitant, afin que leur santé soit prise en charge dans un lieu adéquat et sur le long terme. En effet, même s’il  nous arrive d'apporter des soins en rue, c’est avant tout parce qu’il s’agit d’une manière de créer un lien de confiance. En effet, nous voulons que la personne se mobilise et à terme, réintègre un logement, car c’est la seule façon pour que la santé (physique et mentale) s’améliore.

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